Je peux faire un peu de politique locale ? Après tout, je suis citoyen européen, j'ai donc exprimé mon vote lors des dernières élections communales. Et je m'étonne de la manière dont le collège élu par les urnes, gère mon quartier. Ah je t'avais prévenu, c'est très local. Mais reste, tu vas voir, c'est exotique.
Mon coin, c'est entre la Plaine du Bourdon et la gare du Moensberg et entre ces deux dossiers, j'ai comme l'impression que personne ne travaille ensemble. Si tu n'as pas de carte sous les yeux, je t'explique la géostratégie de l'endroit. La plaine du Bourdon, par un besoin pressant de logements, parait-il, vient de passer de zone plus ou moins naturelle à un fort joli parc dessiné autour du cours d'eau.
A vue de nez, l'espace vert nouveau-né représente à peu près un tiers de la zone naturelle d'origine. Les associations de râleurs habituels ont réussi à grignoter ce petit bout de nature à force de manifestations mais le reste a bel et bien été bétonné. Des immeubles de chez Bouygues
Immobilier se dressent là et, me semble-t-il, sont déjà en vente, vous trouverez ça
aisément.
De manière tout à fait provisoire, sur cet espace laissé naturel et avec l'accord de la commune, un cirque s'était installé. Un de ces petits cirques de province sans prétentions mais qui reste une merveille si tu as gardé un peu d'enfance en toi. Le cirque est une sorte de double décimètre pour mesurer son âme d'enfant.
En dehors des représentations, le cirque avait également développé une fonction importante pour le quartier et les alentours : il proposait des cours et des stages de cirque. Si ce n'est pas pour faire carrière dans l'art forain, tu comprends que socialement, c'est un lien entre les gens.
Un quartier sans boulangerie, c'est un quartier qui ne se parle plus en attendant son tour. Ici, à défaut de pain, il y avait les cours de cirque. Pour le besoin urgent d'implanter ces projets de promoteurs, il a été déplacé à Watermael-Boisfort, une commune voisine. Soit à quarante-neuf minutes de la plaine du Bourdon en transports en commun.
Les gamins du coin qui profitaient de l'animation, tu crois qu'ils font quoi maintenant ? Que leurs parents fortunés envoient du personnel pour les amener là-bas ? Qu'ils se tapent sinon presque une heure trente de Stib aller-retour ? Bien entendu que non…
La ville avance, c'est le progrès. Je suis un peu triste de voir la campagne se muer en ville, les herbes folles se recouvrir de bitume et les enfants se voir priver de lieux de socialisation. C'est mon côté romantique. J'en suis parfaitement conscient et j'accepte l'idée qu'il faut bien loger de plus en plus de monde.
Le problème est que je connais le quartier pour y vivre. Que je n'ai pas besoin de carte pour saisir qu'à ce croisement de la chaussée d'Alsemberg et de la plaine du Bourdon, passe déjà un flot considérable de voitures venues de Flandre et d'ailleurs. A tel point qu'il n'est pas rare que la seule ligne de bus Stib qui nous transporte, la ligne 43, se retrouve embouchonnée bien en amont de la gare de Calevoet.
82 appartements nouveaux ajoutent potentiellement 82 nouveaux véhicules dans le trafic. Implanter à cet endroit de nouveaux logements, fort bien, mais qu'en est-il des conditions de circulations pour y accéder ? Parce qu'à moins de mettre en sens unique la chaussée d'Alsemberg entre le Globe et Calevoet, je ne vois pas. Les voitures s'empilent déjà par dizaines soir après soir.
(et je suis bien conscient qu'une partie de cette circulation pense pouvoir simplement contourner Brugman/ De Stalle et gagner un peu de temps…).
Peut-être que le RER sera une bonne solution. Quand quelques pinailleurs flamingants ne s'occupent pas de contester n'importe quoi d'écrit en français, les travaux avancent. Concrètement, ils déplacent l'ancienne gare du Moensberg pour qu'elle s'occupe de desservir deux lignes importantes. Une vers la Flandre, une vers la Wallonie.
Autant te dire qu'avec ce point d'entrée sur le territoire bruxellois, Uccle pourrait connaitre un développement considérable en terme de circulation automobile. En s'appuyant d'un côté, sur une offre de parking et d'accessibilité du centre ville grâce au RER, et de l'autre en s'assurant d'une évolution urbanistique maîtrisée, y compris en terme de services et de commerces, la commune peut devenir la plaque tournante de la région Capitale.
Enfin, c'est mon analyse de simple citoyen. Je crois sottement que l'arrivée d'une nouvelle gare de RER dans une zone d'habitat demande pour le moins réflexion quant à la manière dont on souhaite que cela se passe. Et quant à la meilleure manière d'attirer et d'ancrer cette population afin qu'elle ne soit pas que de passage. Une sorte de gouverner c'est prévoir mais à l'échelle locale.
La rue du Bourdon (photo ci-dessus) qui va de la plaine du même ruisseau à la gare du Moensberg sature déjà matin et soir de la circulation. C'est une zone scolaire et la route directe vers Linkebeek et la Flandre pour les navetteurs que la SNCB a réussi à faire craquer. Deux bus s'y croisent difficilement. J'ai du mal à imaginer que la commune n'ait pas étudié cette situation.
La rue du Bourdon va devenir l'axe principal d'un tas d'allées-venues. Le RER directement vers le quartier européen, le rêve de la ville sans voitures, c'est tentant. Combien va-t-il falloir accueillir de passagers par jour ? Quelles études ont été faites sur ce point ? Quels aménagements futurs ont-ils été décidé pour d'ores et déjà désengorger la zone ?
Sur le terrain, rien ne change, ça bouchonne, le bus 43 de la Stib a des horaires aléatoires, des immeubles sortent de terre, des ministres inaugurent des parcs et le train fait comme il peut. Sur le terrain, tout se passe comme si la priorité de ce collège communal était plus concentrée sur le nombre d'immeubles disponibles et que sur la manière dont on y pourrait y habiter si on n'arrivait pas tout le temps en retard…
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Pour aller plus loin :
Calevoet-Bourdon : un quartier sous pression brochure de l'IEB - Oct 2010 (PDF).
Des nouvelles gares RER pour Bruxelles ? Enjeux, méthodes et contraintes - Brussels Studies - Janv. 2012 (PDF).
C'est très local ! Mais on ne décroche pas (surtout que tout ce qui touche l'aménagement du territoire est mon dada).
RépondreSupprimerBref... Sont aussi cons chez vous que chez nous...
(pense à mon coeur : un billet chez Poireau... Ca fait deux en moins d'un mois...)
Merci Nicolas.
RépondreSupprimerLes élus locaux d'ici sont peut-être même pires : "ennemis" au plan Fédéral, ils bossent ensemble au niveau communal. C'est genre cul et chemise sans qu'on sache bien qui serre les fesses !
:-)
[Je reprends le blog mais c'est progressif, tas vu ? :-) ].