dimanche 28 mars 2010

L'emploi [Ça me travaille…]


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Quand Alain nous a appris son licenciement, nous avons tous eu du mal à le croire. Il était tellement passionné par son travail, tellement investi dans la réussite de son entreprise. Il ne comptait d'ailleurs pas ses heures malgré une rémunération à peine suffisante pour joindre les deux bouts. Quand nous l'encouragions à négocier une augmentation, il nous disait : «Ce n'est pas comme ça qu'il faut raisonner. Ce que je fais, c'est un investissement sur l'avenir». Il était certain que si la boîte passait cette période difficile, ses patrons lui montreraient de la reconnaissance. Au lieu de cela, il a été remercié et il lui ont montré la porte.

En réalité, son poste a été déplacé en Asie. Là-bas, pour l'équivalent de son salaire, ils emploient une bonne vingtaine de personnes. Les prix de vente ont à peine baissé et même sans sa formation ni son expérience, vous imaginez la rentabilité.

Le service de l'emploi a bien fait son boulot. Il ont aidé Alain à peaufiner son CV, lui ont appris à bien se présenter. Il suffit parait-il de savoir se vendre pour décrocher un job. Il lui ont offert un tas de formations très impressionnantes. Il lui ont même appris à bien plier une feuille A4 en trois partie pour que sa lettre de motivation fasse bonne figure.

Ils lui ont enseigné comment passer un entretien d'embauche et comment éluder les questions gênantes à propos des trous de plusieurs mois dans son chemin de vie. Il lui ont filé toutes les ficelles pour embobiner un recruteur, il devait mieux mettre en œuvre son capital séduction envers les employeurs.

Et dix-huit mois plus tard, Alain en est toujours à guetter les annonces. Les journaux gratuits, le bureau de chômage et même sur internet, il répond à chacune. Ce n'est quand même pas possible qu'il ne trouve rien. Il ne doit pas faire suffisamment d'efforts, ne pas suivre les conseils qu'on lui a prodigués. Ça doit venir de lui. je me demande s'il veut vraiment re-travailler. Dans le fond, c'est peut-être bien un fainéant, Alain…


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Nota Bene : besoin d'un web rédacteur sur Bruxelles ?


25 commentaires:

  1. Peaufiner son CV, apprendre à se vendre, lister vos savoirs et vos savoirs faire, simulations d'entretiens, au téléphone : "Bonjour, je souhaite parler à..." et pas autres choses...j'en passe et des meilleurs...
    Ah, cher popole emploi...
    ...
    Les liens sont biens; "le monolecte" parfait !
    Bon dimanche!!!

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  2. Gildan : savoir se vendre est une formule terrible quand on la pèse… :-))

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  3. Je n'avais même pas vu le lien, mais j'ai accroché à l'histoire, parce que c'est toujours la même putain d'histoire qui yoyote depuis plus de 20 ans, avec toujours les mêmes cocus, mêmes pas magnifiques.
    Les entreprises, faut y aller en mercenaire pur et dur, prendre un max de blé en en foutant le moins possible. Ils nous traitent comme des Kleenex, rendons-leur la monnaie de leur pièce!
    Et non, je ne sais toujours pas me vendre. D'ailleurs, au lieu de faire chier les chômeurs avec des stages bidons, Paul Emploi ferait mieux de déployer des commerciaux de placement, comme dans les boîtes de consultants de luxe : eux non plus ne savent pas se vendre, c'est un putain de métier à part entière, alors, on leur attribut des commerciaux qui font ce boulot-là à leur place, négociation et tout.
    Et devinez quoi? Ça marche très bien et comme les types ont des pourcentages sur les contrats, les salaires crèvent les plafonds!

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  4. Le Monolecte : quoi te répondre, tu as tout bon ! :-))
    Juste un truc sur lequel achoppe ma pensée : pourquoi c'est à la communauté de prendre en charge la formation des chômeur afin de les rendre "employables" ? Pourquoi n'est-ce pas à l'employeur de former les gens aux missions qu'ils veulent leurs confier ?
    Merci !
    :-))

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  5. J'ai essayé de me vendre au poids, mais ça faisait trop cher.

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  6. Nicolas : même en te faisant payer en liquide ? :-))

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  7. J'espère ne jamais être dans la situation d'Alain, un jour :-/

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  8. dadavidov : on peut tous attraper le chômage, même par surprise ! :-|

    (Mince, je m'étais encore aboné à mes propres commentaires ! Pavlov sort de ce corps ! :-)) ).

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  9. Beau billet.

    Oui .... le chomeur finit par se dire que c'est sa faute !

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  10. Elmone : merci !
    Non seulement le chômeur culpabilise mais de plus son entourage finit aussi par le soupçonner d'incompétence. Le résultat social, qui le mesure ?
    :-))

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  11. lu.
    et je n'ai jamais dit qu'alain était fainéant !

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  12. Mademoiselle Ciguë : ce n'est pas Alain Poireau ! :-))) C'est une réflexion générale sur la société face au chômage ! :-))

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  13. Cela peut arriver à tout le monde d'être de l'autre côté de la barrière... Ce que je signifiais à une demie-collègue qui regardait de haut les gens qui avaient des dettes (je parle d'involontaires là) On ne sait jamais de quoi demain sera fait.. Nous n'étions pas là pour juger mais pour planifier les échéanciers de ces gens pas pour les enfoncer... mais chacun son point de vue la-dessus... Bien sûr que lorsque l'on a aucun souci on peut se permettre de juger mais il faut toujours se demander si ce n'est un porte-à-faux...
    Se vendre n'est pas toujours facile !!! se présenter... tout dépend de la tchatche que l'on a...
    quand on est du genre "silencieux"
    c'est décourageant...
    Où alors, il faut tout recommencer de zéro et accepter des conditions de travail difficile (il me souvient avoir rempli mes livres comptables sur le coin d'une machine à coudre dans un atelier bénéficiant par ce biais des mille et une injures que le patron distribuaient à son personnel d'atelier - parce que... l'on ne voulait pas chauffer le bureau... de même que dans la cuisine d'un garagiste avec le ronron du lave-vaisselle pour les mêmes raisons - je travaillais la comptabilité à l'heure à l'époque et dans une région que le travail fuyait déjà ou était exporté - ce n'est pas vraiment récent - comme dit Monsieur Poireau)...
    il faut accepter la même chose pour le salaire : rétrograger en quelque sorte...
    Que les employeurs financent les formations... ils pourraient, ils le peuvent dans certains cas mais le font rarement, plusieurs causes à cela notamment l'absence de l'employé au travail... et plus encore....

    Oh là la j'ai fait un grand com..
    alors que je n'en avait même pas le coeur... coup de blues ...

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  14. J'en reste coite, moi qui suis tranquille enfin (après 10 ans de CDD...)

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  15. Je ne connais pas ce genre de situation, mais "on s'y croirait"… J'ai l'impression que c'est un très bon reflet d'une réalité tragique.

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  16. Jeffanne : quand on pense que tous les chômeurs sont aussi des salariés potentiels… et réciproquement, on s'étonne de l'attitude des uns envers les autres !
    Pour la notion de "se vendre", c'est un peu n'importe quoi et surtout un moyen d'occuper ces gens. S'il n'y a pas de boulot, il n'y a pas de boulot !
    Les patrons devraient obligatoirement se former à leur métier ce qui est rarement le cas. Ils apprendraient notamment à voir plus loin que la rentabilité immédiate !
    Merci pour ce long commentaire !
    :-))))

    nekkonezumi : j'espère que tu l'es et que tu restes solidaire avec les chômistes ! :-))

    Le coucou : je fais toute une carrière par temps de crise pour ma part. Je fais partie en quelque sorte d'une génération sacrifiée sur l'autel de l'ultra-libéralisme et de la réforme permanente ! :-|

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  17. Hélas, ce n'est pas le cas...
    Le patron, lui ne voit que l'immédiat notamment quand il consulte son compte bancaire....
    réflexe journalier...

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  18. Tu n'as pas affiché la source de tes chaussettes...

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  19. Jeffanne : journalier, comme les journaliers d'antan ?

    mtislav : ah ! Tiens ! Je suis vraiment fatigué en ce moment. J'espère qu'il se reconnaitra ! (j'avais cherché "abandonned socks" sur flicr, de mémoire…).
    :-))

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  20. Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.

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  21. GuyB : on vit tous la même histoire, c'est une chanson de Sheller ! :-))

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  22. Putain Isidore, ta note va me flinguer le week-end de Pâques !!!

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  23. Cette culpabilité que l'on fait peser sur le chômeur est terrible et très injuste! Concernant le travailleur ou le travail, je crois qu'il s'est opéré un changement de considération et de valorisation! Madame Kévin, dans un de ses billets, proposait d'utiliser le terme "d'offreur de travail" je crois et non plus de demandeur d'emploi. On n'emploie très peu ce mot de travailleur depuis quelques années.Chacun a un savoir à proposer et "à vendre", mais on ne vend pas sa personne!
    J'espère qu'Alain trouvera un travail dans lequel il s'épanouira.

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  24. Deftones75 : bin non, toi tu démarres ta boîte, tout va bien ! :-))

    Izziie : merci de ce commentaire.
    Alain, qui est un peu moi mais en fait non quand même, cherche allégrement ! (à bon entendeur bruxellois…).
    Tu as raison et madame Kevin aussi. Mais il serait aussi nécessaire de comprendre et d'accepter l'idée que quand il y a 4 millions de chômeurs pour en gros, 5 cent mille postes disponibles sur le marché, ça ne sert à rien d'accuser les offreurs d'emploi de ne pas trouver !
    Il existe un "stock" de demandeurs plus ou moins important suivant les périodes économiques, c'est une variation économique dont les offreurs de services ne devrait pas porter la responsabilité. La culpabilité encore moins !
    :-))

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