vendredi 12 octobre 2018

Le rêve américain [la bannière étiolée !]



L'élection de Donald Trump, c'est la réalité du monde qui surgit par surprise dans la narration médiatique. Je ne vais pas développer ici les raisons ni la manière dont ce monsieur est parvenu à poser ses grosses fesses dans le bureau ovale. [Enfin, sur la chaise qui est derrière ledit bureau bien que le personnage soit tout à fait capable de poser son adipeux postérieur sur l'espace de travail].

Je souhaite juste souligner qu'il a été élu parce qu'il a dit tout haut ce que l'Américain moyen voulait entendre car c'est sa perception du monde : loin des places financières, le mythe américain s'est évaporé, écrasé par les sabots du réel*. Il y apparait désormais clairement pour ce qu'il était : une légende, une utopie, un conte pour grands enfants bref une forme de propagande en faveur des plus riches.

Donald Trump est le grain de sable qui a arrêté le ronron des chaînes d'infos en continu sur le self-made-man parce que tu le vaux bien. La sauvagerie libérale a dévoilé sa face hideuse ; au fin fond des États-Unis, ça se passe exactement comme à Chartres ou à Lannion : la mondialisation a fait partir les usines et par manque de moyens de la clientèle restante, les magasins locaux ferment les uns après les autres.

Pendant que l'élite compte les dollars que rapporte l'exploitation d'une main d'œuvre lointaine et bon marché (et accumule les bénéfices défiscalisés), une partie de plus en plus importante de la population se prend dans les dents la fin de la société où il fait bon vivre*. La main du marché est partie se dorer la pilule aux Bahamas et elle a emmené avec elle l'ascenseur social.

Donald Trump a donné un bon coup derrière la nuque à la théorie de la liberté du marché et de la dérégulation, à ces sornettes à propos de l'équilibre naturel des choses du commerce. Il est le premier président des États-Unis à reconnaitre officiellement que l'État doit intervenir en tant que régulateur* des opérations au service de sa population.

Et pendant ce temps-là, de ce côté-ci de l'Atlantique, l'Europe signe les uns après les autres, les traités de libre échange et de concurrence saine et non faussée. C'est qu'à Bruxelles où elle réside, elle ne doit pas en voir beaucoup des Européens moyens*. Et pendant ce temps-là, les imbéciles regroupés sous l'étiquette enmarche s'activent à réduire l'État français qui jusqu'ici nous protégeait un temps soit peu de la concurrence de chacun contre chacun.

Emmanuel Macron* agit tout à fait comme s'il n'y avait pas de revirement du monde, comme si la crise de 2008 n'avait jamais eu lieu ni comme si les Anglais n'avaient jamais décidé de revenir à l'échelle nationale du #Brexit.

On peut hurler tout ce qu'on veut à propos des populismes, nous sommes passés si brusquement du statut de troupeau de moutons à celui d'une meute de hyènes libres que la plupart d'entre nous en sommes encore tout étourdis.



Nota benêt : un populiste ne t'écoute que pour se faire élire,
il n'a aucune solution satisfaisante.

[Source image : * ]

mardi 18 septembre 2018

Service bancaire [Service bancal]




Ma banque m'a prélevé quinze euros parce qu'elle n'a pas pu honorer un prélèvement. Et puis quinze autres euros qui est le prix pour m'écrire une lettre, imprimée sur papier afin de m'apporter la nouvelle. J'espère qu'elle ne va pas aussi m'écrire pour m'apprendre qu'elle m'a adressé un courrier, ce serait une vis sans fin.

Inutile de te dire que je suis un peu déçu. Quand ils ont décidé de faire payer la propriété d'un compte en banque*, je me suis réjoui : enfin, les clients allaient disposer d'un vrai service en échange du paiement d'une cotisation, mais non !

Je paie pour avoir un compte mais la banque n'a aucun service à me proposer en échange. Elle ne me traite pas du tout comme un client. Par exemple, elle sait parfaitement que chaque mois, de janvier à décembre, mon salaire est versé le 9. Si un prélèvement se présente le 8, elle pourrait aisément le mettre de côté pour 24 heures et y revenir lorsque mon compte aura été crédité.

Ou bien, puisque je suis le client qui verse régulièrement son obole afin de bénéficier des ses services, la banque pourrait m'envoyer un e-mail d'alerte auquel il me serait loisible de répondre : t'inquiète pas mémère, mon salaire arrive le 9 comme d'habitude. Bisous.

J'imagine que dans notre ère technophile, il serait même possible de l'automatiser. C'est pas comme si les banquiers n'avaient pas d'informatique à disposition.
Au lieu de cela, la banque encaisse des deux côtés : d'abord elle me monnaye le droit de disposer d'un compte, ensuite, elle s'engraisse en facturant l'absence de service qu'elle est censée rendre.

Payer un compte auprès d'une banque qui ne fournit aucun service en contrepartie, je me demande si nous ne sommes pas un peu cons.


[Ceci est une fiction, j'ai pas de compte dans une banque]


Nota benêt : j'appelle ma banque mémère, si je veux.

Source image : *

samedi 28 juillet 2018

Ce qui se dit [Hors champs]




Je trouve cette vidéo bouleversante. Il s'y raconte ce qui se dit dans la rue, sans le filtre du journaliste.

L’étudiante : C’est pas possible d’être devant le McDo pour filmer la violence quoi ! La violence c’est les CRS qui nous la…
Une femme hors-champs : ça montre des vitres cassées plutôt que des gens qui se font tabasser. Sérieux, c’est drôle !
L’étudiante : on s’est fait casser toute l’après-midi, on s’est fait casser toute l’après midi, vous voulez qu’on fasse quoi ? (elle pleure)
(brouhaha)
L’étudiante : c’est vous ! C’est vous qui allez montrer au public ce qui s’est passé aujourd’hui, montrez-leur qu’on s’est fait casser la gueule (…) qui sont en train de se faire embarquer par des policiers quoi. Juste parce qu’ils ont voulu manifester un premier mai. Un premier mai, quoi ! Ça sert à quoi ? On peut même plus manifester, c’est quoi ce pays ? Elle est où la démocratie ? Elle est où la liberté, l’égalité, la fraternité ?
Un homme, hors-champs : y’en a pas ! Y’en a pas !
L’étudiante : ben oui, y’a pas et du coup, c’est pour ça, on se fait gazer. C’est pour ça !
Un homme, hors-champ : moi, je suis avec vous, en tout cas, je suis pas…
L’étudiante : et après du coup, on filme un McDo qui a été cassé parce que, ouais, on en a marre de tout ça, on en a marre et après on se fait nasser et il y a des collègues à nous qui se font embarquer par le commissariat. Juste parce qu’ils ont voulu manifester, qui sont, ouais, un peu typés, qu’ils ne sont pas blancs avec des yeux bleu, quoi !
Une femme, en arrière plan : ce sont des étudiants pas des casseurs qui sont en train de se faire nasser là.
L’étudiante : des étudiants ! On a des partiels, on a des études à faire, (…) pour prouver que nous, on veut encore avoir l’égalité des chances, on veut encore pouvoir aller à la fac, payer normalement nos études, et pas à quinze mille balles notre année. Et là, bah voilà, on ne peut plus faire ça parce que du coup, on se fait frapper, on se fait frapper et on se fait gazer, il n’y a plus rien qui va dans ce pays. On se fait nasser, c’est n’importe quoi ce pays, c’est n’importe quoi ! C’est fatigant, tous les jours, de redire la même chose.
Un homme, en arrière plan : un petit peu d’honnêteté journalistique en filmant aussi ce qui se passe autour.
L’étudiante : vous filmez un McDo pour les violences parce qu’il y a un «black bloc» qui a fait ça quoi.
Une femme, en arrière plan : on travaille dans l’image aussi, on a quelques notions (…) la manipulation d’image on sait ce que c’est.
Brouhaha. 

La femme de l’arrière plan, hors-champs : on est dans le cinéma, on sait très bien comment on manipule les images, donc arrêtez !
L’étudiante, hors champs : on a tous vingt ans, vous voulez qu’on crève à vingt ans ? C’est quoi, ça ? C’est quoi la future jeunesse de la France ?
Une femme, hors champs : ben, y’en aura pas, on sera tous…
L’étudiante, hors champs : c’est des étudiants qui auront 23 ans qui vont devoir payer vingt milles balles, quarante mille balles, leur année en primaire pour pouvoir apprendre que un + un, ça fait deux…



[La vidéo est de SylvainErnault. J'ignore qui sont ces personnes filmées, n'hésitez pas à vous signaler en commentaire !]

—> D'autres plans tournés ce même jour

vendredi 20 juillet 2018

Donkey Kong Country [Le(s) bracelet(s)]


Je ne sais pas si c'est à cause de ma formation en cours mais en ce moment, je focalise beaucoup mon attention sur la manière dont sont fabriquées toutes les images qu'on nous montre. C'est à dire que quand tu commences à en tourner toi-même, tu analyses forcément la façon dont les autres s'y prennent.

Du coup je repère des erreurs que même nous, à notre petit niveau de débutants, on éviterait de commettre. Je parle ici de cette publicité pour la version de Donkey Kong Country sortie sur la Nintendo Switch. Si tu veux voir la vidéo originale, c'est ici —> <—

Tu n'es pas obligé d'aller voir, c'est une publicité mais c'est un bon test de la regarder avant de lire la suite de cet article. C'est pour évaluer ton attention aux images.

Alors ?

T'as vu ?

Non ?

Je t'ai fait un montage de tous les plans foireux dans la continuité du récit, il s'agit d'une histoire de bracelet(s) : un seul au poignet, puis trois sur le gros plan puis un seul, c'est la suite du plan antérieur, puis aucun sur le plan de demi ensemble, etc. J'ai ralenti la vitesse pour que tu aies le temps de bien voir !



(c'est la 1ère fois que colle une vidéo sur blogger, j'espère que ça fonctionne parce que sur la prévisualisation, pas du tout ! *emoji peur*)

Je ne sais pas s'ils ont oublié de payer le ou la scripte, je ne sais pas s'ils savent même ce que recouvre ce terme mais je trouve qu'à ce niveau de bévue, on atteint les limites du comique. Tu crois qu'ils l'ont fait exprès ?

Nota-benêt : le copyright de cette vidéo
appartient à son propriétaire, qu'il se dénonce !




       
                                                                                                                                                 
PS : j'en profite si tu passes par là et que tu es un professionnel de la profession : je cherche un stage de technicien audiovisuel (sans obligation de rémunération) du 24 septembre au 14 novembre prochains. J'aime le montage et la musique. Je suis à Perpignan mais si je peux m'organiser, je suis mobile.
                                                                                                                                                        

samedi 14 juillet 2018

Le temps d'attente [tout va trop vite !]



Tu te souviens des téléphones d'avant, ceux qui avaient un fil à la patte, qu'on posait dans le couloir de l'entrée, souvent sur un napperon de coton macramé et qui possédaient un cadran rotatif ? Les gens devaient introduire leur doigt ou n'importe quel objet faisant office, dans la cavité proposée juste en face du chiffre désiré pour ensuite faire pivoter l'ensemble autour de son axe jusqu'à la butée prévue.

Une fois atteinte cette extrémité, il fallait relâcher l'engin et attendre que le cadran, grâce au retour de force d'un ressort tendu lors de l'opération précédente, regagne sa position initiale. Pendant ce temps, dans le combiné collé contre l'oreille, on pouvait entendre le codage numérique résultant de l'opération, une série de claquements sourds et électriques pour indiquer à une machine située à l'autre bout du pays, qu'on venait de composer le 7.

Le jour où les numéros de téléphone sont passés à dix chiffres, il y a eu des suicides face à tant d'ennui.

Constatant que selon la science, le présent n'a pas changé son rythme de battement, je me demande ce qui nous pousse ainsi à ne plus supporter aujourd'hui la moindre attente, la moindre durée sans évènement. Où sont passées notre patience et l'épaisseur du temps ?
 
Ce n'est pas notre environnement qui nous pousse à la vitesse, c'est nous qui trouvons trop lente la normalité temporelle. L'ascenseur à qui l'on a commandé d'arriver sur l'instant semble se traîner en chemin, ce train pensé pour la très grande vitesse s'étire à 160 km/h à travers le paysage d'une campagne monotone, le colis qui devait être livré hier sans faute arrivera insupportablement plus tard et l'amour que l'on espère, il s'est encore perdu en chemin….

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Source Image*

dimanche 24 juin 2018

« Depuis les années 80, on a du chômage de masse et du sous-emploi. Ceux qui voudraient travailler à plein temps ne travaillent qu'à mi-temps. Le système politique est à l'origine de cette pénurie d'emploi. Non seulement ça ne se résout pas mais ça ne cesse d'augmenter.

Ceux qui sont au sommet de la hiérarchie, ceux qui monopolisent le marché, les multinationales, l'État et les politiciens qui défendent leurs intérêts ne veulent pas mettre ce système en cause, malgré les fortes inégalités.

Si tu es au chômage, on va te convaincre que c'est de ta faute. Parce que si ça ne vient pas de toi, c'est tout le système qui est remis en cause. Et aucun groupe politique n'admettra ça. (…) Tu dois être persuadé que c'est de ta faute. Si tu n'as pas de travail, c'est parce que ton CV est mal rédigé ou parce que tu n'as pas assez cherché. Du coup, tu seras puni.

Ils vont interrompre les indemnités que tu touches. Pour un mois, ou bien pour 3 mois. Dans le pire des cas, ça peut aller jusqu'à trois ans ! Trois ans, sans aucun revenu. En Grande-Bretagne, c'est le pire châtiment pour n'avoir pas trouvé l'emploi qui n'existe pas. Du moment où tu crois que c'est de ta faute, l'État dispose d'une classe pauvre qui reste en bas du système et qui ne se révolte pas.

C'est une question d'idéologie et de conscience. Le rôle de la gauche est de dire : “on ne peut pas tolérer ça parce que c'est le système en soi qui exige et produit le chômage, le sous-emploi, la pauvreté, etc.” ».

Ken Loach, interview pour la sortie de «Moi, Daniel Blake*», septembre 2016
 

vendredi 25 mai 2018

Le tout-marché [vous prenez les chèques ?]




Ils jurent encore au tout marché alors que sous nos yeux, ce qu'ils appellent "le marché" échoue à nous assurer une vie confortable. Qu'est ce que c'est que ce système qui ne peut pas prendre en charge nos aînés comme il est sensé le faire. Qu'est ce que c'est que ce quart de la population du pays qui a le frigo vide quand arrive le 15 du mois ?

Qu'est ce que c'est que ce système où l'argent que rapporte la location d'une chambre en Ehpad est plus important que ta maman que tu leur confies ? Ça coûte trop cher de torcher papy quand son corps fatigué fait des siennes ? Qu'est ce que c'est que ce système dans lequel le rapport est une règle de profit en dépit de son humanité ?

Qu'est ce que c'est que ces gens qui dorment à la rue, étranger ou pas, qu'est ce que c'est que ce système qui justifie que cela est normal. Qu'est ce que c'est que ces gens qui travaillent et dorment dans leur voiture, et ceux qui font ramadan plusieurs fois par an, parfois sans être musulman. Le marché s'auto-régule, merci de bien vouloir nous excuser pour les désagréments passagers.

Ils jurent encore au tout marché qui pousse le monde à la misère et la planète à sa destruction. Les quelques uns qui s'enrichissent c'est le tonneau des danaïdes pour notre sueur, qu'est ce que c'est que ce système où tout le monde lutte contre chacun sans qu'il y ait jamais de victoire possible, qu'est ce que c'est que ce système dans lequel des gens se lèvent le matin et n'en peuvent plus d'être inutiles ?

Nota benêt : une crise économique
qui dure trente ans n'est pas une crise,
c'est un système.

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Source image*

dimanche 20 mai 2018

Chez E.Leclerc [commerçant, c'est puissant !]



Dans la dernière publicité télé pour les magasins E.Leclerc, les deux crétins qui incarnent l'identité de la marque depuis quelques temps racontent que les gens veulent manger mieux et qu'ils ont bien raison. Jusque là tout va bien, la grande distribution qui se préoccupe de la bonne alimentation, ça envoie du rêve. Mais c'est ensuite que ça se gâte : les deux olibrius expliquent alors que, comme manger mieux ça coûte plus d'argent et que ton salaire n'augmente pas, il faut aller chez Leclerc qui est moins cher.

En vil gauchiste que je suis, mon cerveau traduit aussitôt le propos : comme mon salaire n'augmente pas et qu'il y a peu d'espoir que cela change, l'enseigne se charge de faire pression sur le producteur pour pousser le prix à la baisse et que je puisse acquérir son produit. Le résultat de l'opération, si tu réfléchis, c'est que tout le monde reste pauvre sauf Michel-Edouard qui a facturé sa commission au passage.

Le monde de rêve que propose la grande distribution est celui-là : des clients pauvres qui achètent à des producteurs exploités au profit du distributeur.

La technique de chantage est bien connue : comme le producteur a besoin de figurer dans les rayons pour vendre son produit, il est totalement dépendant du commerçant. Il faut dire que les gens sont stupides, et moi le premier : 85% des courses alimentaires se font au supermarché, ce qui offre aux distributeurs le flingue pour tenir en joue notre société.

Ainsi en ce moment, Leclerc est en guerre contre Fanta. Ce n'est pas un petit producteur local de rien du tout, c'est le groupe Coca-Cola*. Quelqu'un chez l'épicier breton a dû découvrir dans un tableur Excel que ce soda ne rapportait pas assez. Pour obliger l'industriel à baisser son prix et augmenter la rentabilité, Leclerc a sorti l'arme lourde : plus de produits en rayon. Ça doit bien faire trois semaines (à ce jour) que la limonade orange a complètement disparu des linéaires.

Evidemment, dans ce bras de fer, tu peux jouer ton rôle de consommateur. Par exemple, quand tu vas faire tes courses, si tu as décidé d'acheter du Fanta et que tu n'en trouves pas en rayon, tu n'achètes rien d'autre. Si tu as cinq minutes et l'esprit frondeur, tu peux te rendre en caisse centrale, faire appeler le chef de rayon et exiger des explications sur l'absence de Fanta dans son rayon.

Mais si tu n'as pas le temps parce que tu es juste venu faire tes courses, il convient surtout que tu renonces à acheter autre chose que ce que tu avais prévu d'acquérir. Refuser d'acheter est la meilleure arme dont tu disposes en tant que consommateur. Parce qu'en plus de supprimer le Fanta de ton rayon, le magasin qui veut t'éviter le choc psychologique d'un rayonnage vide, va pousser pour te refourguer le produit de sa marque pour augmenter sa rentabilité.

Puisque chaque secteur fait l'objet d'une analyse de gestion, l'absence d'une grande marque doit absolument être compensée par la vente d'autre chose afin de maintenir le volume d'affaires du rayon. Et quoi de plus rentable pour le commerçant que de te refiler son propre produit plutôt que le leader du marché ?

Les marques magasin, il faudrait qu'on en parle un peu plus d'ailleurs.

Si au début, l'idée du supermarché était de regrouper en un seul lieu tous les produits parmi lesquels la ménagère pouvait venir faire son choix, on assiste aujourd'hui à un incroyable repli, la plupart des enseignes ne proposant plus que trois produits par gamme : la marque référence du secteur, sa copie au logo du supermarché et enfin, les produits tellement bas de gamme qu'ils sont sans marque, personne ne voulant associer son nom à ces ersatz.

La marque magasin, c'est quand ton commerçant va chez le producteur pour dire : dites donc les gars, il est vachement bien votre produit, les gens en veulent, c'est délicieux et tout, vous ne voudriez pas nous fabriquer le même mais moins cher et à nos couleurs ? Comme la menace est toujours là de se voir retiré des rayons en cas de refus, le producteur s'exécute, modifie sa recette pour rentrer dans les clous du cahier des charges et survit tant bien que mal à ces conditions.

Sauf que si le produit initial était un vrai produit de qualité, la baisse de prix pour l'adapter aux conditions exigées par le distributeur se fait au détriment du produit lui-même. Parce qu'il n'y a pas de secret et que la grande distribution n'a toujours pas inventé la pierre philosophale : la qualité a un prix et vouloir baisser ce prix, c'est baisser la qualité. 

Puisqu'on a la chance d'être dans un pays qui informe le consommateur de ce qu'il mange, tu peux vérifier dans les rayons en prenant le temps de comparer les compositions. Tu vas ainsi te rendre compte que les marques distributeurs, pour être moins chères, remplacent de la viande par du gras, ajoutent de l'eau dans les sauces, augmentent le taux de sucre et incorporent des épaississants pour la tenue.

Quant aux produits sans marque, c'est encore pire. Comme il n'est plus techniquement possible d'abaisser le coût des ingrédients, les producteurs vont utiliser toute la palette de la chimie moderne pour tenter de copier le goût initial. Il n'est plus du tout question ici de qualité mais uniquement de rendement.

Pour l'exemple, au rayon pâtés en conserve, si tu regardes en détail le contenu des petites boîtes, tu découvriras que les produits dépourvus de marque se composent pour la plupart de gras, d'eau et d'épaississant, la part de viande animale qui est quand même à la base le constituant du pâté n'arrive qu'ensuite en proportion. Je me demande dans quelle mesure on peut encore parler d'aliment tellement ça se rapproche du déchet.

Conclusion : si un supermarché vante la qualité moins chère dans une publicité, c'est vraisemblablement pour augmenter son profit en te vendant des merdes industrielles.


Nota benêt (extrait de la publicité E.Leclerc) :
mais quand c'est mieux, c'est pas plus cher ?

Rappel : pour mettre du beurre dans les épinards faut déjà avoir de quoi acheter des épinards. Même les petits dons sont les bienvenus [ —> ]
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Source : image extraite de la publicité télévisée Leclcerc* (je n'ai pas trouvé le nom des comédiens…)

mercredi 9 mai 2018

La Constitution [la règle du hors-jeu !]



Je ne vais pas du tout vous parler du fond de la réforme constitutionnelle que projette de réaliser Emmanuel Macron. De toutes façons, vous connaissez mon avis sur notre nouveau président de la république : vous n'auriez jamais du voter pour la réincarnation d'Alain Madelin, ça sent déjà le renfermé.

La Constitution*, c'est le texte suprême. C'est lui qui définit notre République et la manière dont elle fonctionne. Et le truc qui me chiffonne dans cette histoire, c'est que l'Élysée décide d'en modifier le contenu sans même nous consulter.

En gros, c'est un peu comme si au football, les joueurs se réunissaient entre eux pour décider de ce qu'ils ont le droit de faire sur le terrain. Sauf que les arbitraires du système, c'est nous. AKA "le peuple souverain".

On n'a pas coupé la tête du Roi pour que se mette de nouveau en place un système dans le lequel le citoyen est juste informé des changements qu'on a faits en son nom. Même s'ils décident de repeindre l'Assemblée Nationale en vert kaki avec camouflage, nous sommes concernés.

Par exemple, Macron veut supprimer des postes de députés. Dit comme ça, ça a l'air sympa mais est-ce une bonne idée que, du fait d'un plus grand nombre de concitoyens à représenter, ton élu devienne injoignable ? Est ce que tu trouves que c'est la bonne solution en ces temps de recentralisation autour de la personne du Président. AKA Le Petit Marquis.

Quelle que puisse être ton opinion sur le fond de cette réforme, qu'elle te paraisse juste, nécessaire, gravissime ou cosmétique, il t'appartient, il nous appartient d'en décider. Ça n'est pas aux joueurs de définir les règles du jeu.


Nota Benêt : s'il faut réduire les députés de 30%,
je propose qu'on commence par la tête.

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Source pour l'image*

samedi 31 mars 2018

La roue tourne [Elle part à quelle heure ?]



Je me demande parfois à quoi sert de continuer de me battre avec 437 euros par mois. Je me suis construit une bonne estime de moi, quasi indestructible. Je n’ai de ce fait, rien à prouver à quiconque. J’existe par moi-même en tant qu’individu autonome et adulte, je me suffis. Devenu orphelin par le passage du temps, je suis devenu l’unique responsable de mon destin.

Il m’apparait parfois comme une certitude que ce destin n’a aucune espèce d’importance. Je ne suis pas mégalomane au point de croire que le monde sans moi serait moins intéressant. Si j’ai conscience de ma propre valeur, elle n’a de sens que et uniquement pour moi-même. Le reste est illusoire.

Je me fais à l’idée que je ne compte pour personne, que ma disparition, si elle avait lieu, perturberait quelques vies, quelques jours, peut-être mais guère plus. Je ne suis indispensable qu’à moi-même et j’ai chaque jour clairement conscience de ma propre incongruité sociale.

Dans cette société que nous avons construite, c’est bien la situation économique qui entraîne tout le reste. Parce que le RSA ne permet tout simplement pas de vivre, il finit par marquer au plus profond de ses récipiendaires, leur propre inutilité en tant que bouches à nourrir.

En n’accordant à chacun des délaissés de l’emploi qu’une somme ridicule, c’est la société toute entière qui leur envoie le message qu’ils sont des passagers surnuméraires, des clandestins voire des parasites. Un excédent de main d’œuvre. Un "trop" dont on ne sait que faire.

Si tu ne produis rien, tu n’es rien.

À la recherche d’un rôle qu’on pourrait t’accorder dans la pièce en train de se jouer, tu deviens comme un intermittent de l’existence. Tu n'es plus invité pour les sorties, on ne compte plus sur toi pour les festivités. Tu descends peu à peu les marches de la condition sociale. Il n’y a pas de tapis rouge, pas de photographes, il n’y a personne pour immortaliser l’instant dans sa durée.

C’est que pour être quelqu’un sur scène, il faut participer au jeu.

Dans cette société que nous avons construite, la position sociale est définie par ce que tu possèdes et ce que tu achètes. Acquérir des objets, effectuer des dépenses, soutenir l’industrie de l’entertainment et de la joie pour tous, aller manger au restaurant, affirmer ta personnalité par l’appropriation des biens de consommation.

Pris au piège au bas d’une l’échelle sociale dont on a graissé les barreaux, c’est épuisant de croire qu’on pourrait remonter. C’est épuisant de croire que je pourrais remonter. Même les plus enthousiastes des rats de laboratoire finissent par ne plus faire tourner la roue dans laquelle on les insère. Ils finissent par se lasser de l’expérience de la roue elle-même…


Nota-benêt : vivre au RSA consiste essentiellement
à constater l'impossibilité de vivre,
même et surtout si l'on aime vivre.

[Source image *]