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jeudi 8 avril 2010

Les clés de bagnole [transport comique !]


Quand tu as Depardieu dans un film, tu te fous de savoir s'il joue Louis XIV ou un simple fromager. L'acteur est bon, tu te régales et ça devrait suffire. C'est ce que nous explique Laurent Baffie dans son film «Les clés de bagnoles».

Le pitch tient en quelques mots : l'histoire d'un gars qui a perdu le moyen d'ouvrir son véhicule passe une heure et demie à les chercher. Toi, t'es dans ton fauteuil de cinéma, tu es pris en otage par le réalisateur qui de toute façon à la maîtrise totale sur les événements.

Tu n'as pas le choix alors que, le type qui a écrit sa petite histoire, décide exactement de ce qu'il veut, quitte à ne pas paraitre réaliste. Mais ce n'est pas la vraie vie, c'est juste du cinéma et puisque tout est y possible, pourquoi se contenter des régles qui dirigent le monde ? L'auteur-réalisateur se régale à enchaîner les mises en abîmes et les ruptures, les personnages comme chez Tex Avery sortent du décor pour se permettre des commentaires.

Daniel Russo discute de son rôle avec Laurent Baffie en plein milieu d'une scène, se met à jalouser l'excessive sympathie du chien que le scénariste lui colle comme partenaire, les costumes ne sont volontairement pas raccord, les ellipses font exploser le récit, le font sortir de ses rails temporels et rebondir l'action. Le plus improbable devient alors possible et d'ailleurs, il arrive.

Les acteurs apparaissent derrière les personnages, le tournage est montré, l'équipe au travail et la mécanique de la fabrication, les trucages sont soulignés, détournés de leur fonction et les moyens dont le montage abuse pour tromper le spectateur (le flash-back pour la scène de cul par exemple) sont révélés. Sans cesse Laurent Baffie dénonce le mensonge que constitue le cinéma.

Mais, comme on se prête à croire aux extra-terrestres, à trouver touchant le petit chien qui pleure pile-poil au moment où la musique démarre, à vibrer lorsque l'héroïne reçoit enfin le baiser qu'elle espérait depuis trois bons quarts d'heure, il faut ici accepter le jeu que Laurent Baffie nous invente pour sentir des sentiers battus. A quoi servirait de nous refaire un énième film policier dans lequel le héros gagne à la fin, une comédie romantique dans laquelle le personnage masculin dépasse ses propres faiblesses, porté par un amour véritable ?

Laurent Baffie décide, au contraire, d'exploser le jeu lui-même avec un film dans lequel tourner un film est un des éléments de la narration. Il nous raconte que tout est faux, tout en nous emmenant à travers son histoire. On se marre de ses inventivités saugrenues, des répliques qui tombent juste et même des gags qui tombent à peu près juste.

Le film fourmille de trouvailles pétillantes, de clin d'œil en référence au cinéma [tiens, le magasin s'appelle «Les 400 coups»] et de cynisme quant au métier lui-même. Il pousse même le cynisme de la profession à son paroxysme en s'offrant une scène avec des dauphins, car comme le dit le Professeur Rolin en bon statisticien des succès de l'industrie cinématographique : «il faut une scène où vous nagez avec des dauphins : ils ont une cote de popularité incomparable».

J'ai pensé à la folie des Monthy Python, à l'univers éclaté de Marcel Gotlib [en guest star dans le film qui, soit dit en passant, se paie une sacrée brochette de grosses pointures !]. Un peu à Franck Capra dans l'utilisation des changements de rythmes dans le récit. Pour avoir lu les critiques à sa sortie, j'avais peur de m'ennuyer mais j'ai vraiment ri comme un crétin, je me suis fait avoir par cette non-histoire pour un vrai film. Je vous le conseille fortement.