mercredi 30 novembre 2011

Eva Joly [C'est du propre !]




Ça va peut-être vous surprendre mais moi je l'aime bien Eva Joly*. D'abord, le coup des lunettes, c'est génial. Ça y est, en quelques semaines, elle a implanté son image. C'est une épure, une esquisse, une personnalité toute entière résumée en une paire de lunettes rouges. Au niveau communication*, c'est fortiche.

Mais elle m'était sympathique pour une question de fond*, quand elle avait posé la question du défilé du 14 juillet. Et pourquoi est-ce devenu un truc militaire ? Si à l'origine, c'était l'armée du peuple dans les rues, c'est maintenant tout un boulevard de soldats professionnels*. Pourquoi est-ce eux qu'on met à l'honneur ? Et pourquoi pas plutôt une procession d'associations ? Un cortège de la fonction publique ? Un défilé de syndicat ?

Après tout, c'est bien là qu'on le trouve le plus, l'effort citoyen, non ? Vous imaginez comme ça aurait de la gueule : en premier les pompiers dans leur uniforme à boutons dorés, puis les infirmières modestement moulées de blouse, les maîtresses d'écoles en jupe [ah madame Berthelot et son enseignement des Sciences Naturelles !], les professeurs de littérature en veste de velours, les profs de sport en short haut de cuisse*. Elle aurait l'air un peu moins martiale, notre Fête Nationale, non ?

Et puis maintenant avec sa réaction à l'accord électoral intervenu entre le Parti Socialiste et Europe Ecologie. De la cuisine électorale en sous-main*, on s'échange des circonscriptions contre des promesses, des votes de citoyens contre des sièges à la Députation. Et pourquoi c'est devenu un truc réservés aux Partis ? Si à l'origine, c'étaient des élus du peuple, on a maintenant tout un troupeau de mercenaires*. Pourquoi c'est eux qu'on met à l'honneur ?

Evidemment, toute la classe politique et médiatique en a profité pour se réconcilier et lui tomber dessus. De quoi elle se mêle la mamie* à l'étrange accent ? Ça fait des siècles qu'ils procèdent ainsi, qu'ils traitent ces choses entre eux, en toute discrétion. Qu'est ce qu'il lui prend de vouloir casser ces petits arrangements entre amis ?


Ça va peut-être vous surprendre mais que je trouve qu'Eva Joly soulève de bonnes questions quant à l'état de notre démocratie*.



Citation de Cabu :
« C’est peut-être ça la politique,
le compromis perpétuel :
entre compromis et compromission. »*




Illustration : vous pouvez essayer à la maison, les lunettes ne font pas tout*.



[J'ai même pas parlé de Cécile Duflot, elle va être furax !] 

lundi 28 novembre 2011

L'incertitude [tu vas où ?]





Les croyants, dans un sens, ce sont ceux qui ont le moins d'imagination*. Ils acceptent la théorie qu'on leur présente comme vraie et ne cherchent pas à aller plus loin. Quant à savoir s'il s'agit de leur part, d'une peur de l'inconnu, d'une fainéantise neuronale ou d'un excès de naïveté…

Les athées, à l'inverse, sont en questionnement. Ils admettent l'incertitude. Il y a bien sûr une part importante de cartésiens, pour qui un caillou est un caillou*. Ils nient jusqu'aux forces telluriques. Mais la plupart des impies ne sont au contraire limités par aucune religion.

Ils peuvent décider un jour d'explorer la thèse du Monde* en tant que sphère posée sur le dos d'un éléphant et plus tard, la ranger définitivement au placard. S'il s'agit d'une chose amusante par la liberté qu'elle procure, l'absence de foi est aussi une confrontation avec l'angoisse.

Là où le religieux se tourne vers la prière, vers la présence rassurante d'un ami imaginaire et bienveillant, le mécréant est seul face à la réalité du monde. Nul paradis ne vient adoucir la mort des êtres chers*, nulle montée au ciel à laquelle recourir contre notre petitesse…


Illustration : le d.ieu Ganesh [qui c'est ?]

dimanche 27 novembre 2011

La barbarie [stop !]




Au début, ils se battaient comme des barbares, à l'épée, au marteau et s'il fallait défoncer un crâne ou deux à coup de pierre* pour terminer, ce n'était pas de refus. Et puis, je ne sais pas si c'est la vue du sang ou à cause des taches difficiles à enlever sur le linge — à une époque où les lessives modernes n'étaient encore qu'une promesse marketing* — mais les combats se sont un peu améliorés.

Je veux dire en terme de bien-être humain. Par exemple, on a cessé de systématiquement torturer les prisonniers. On a accepté l'idée que d'avoir choisi le camp d'en face, ça peut tout aussi bien être un coup du sort. On a intégré qu'à la place des prisonniers ennemis, on apprécierait soi-même un peu plus de confort*.

Plutôt que de laisser la liberté à chacun de pratiquer la boucherie* selon son bon vouloir, il a été décidé de réguler l'exercice de la guerre. Ça nous a globalement plutôt bien réussi puisque nous sommes aujourd'hui plus de sept milliards pour en témoigner*. Et ça n'a en rien empêché le progrès technique vu que nous disposons du moyen de les tuer tous en seulement quelques minutes.

C'est donc bien par la régulation* que ce fait le progrès. Voilà.




Illustration : Boucherie Perennes, 1974*

jeudi 24 novembre 2011

Le vécu [Merci d'être venu !]




Je n'ai pas trop de mal à répondre à la question tarte de savoir pourquoi je suis de gauche. Je n'ai pas choisi mon camp politique pour avoir entendu mon père maugréer d'un humour méchant contre les fonctionnaires autour de la table familiale ni parce que maman* œuvrait dans une association d'aide aux plus démunis.

Je viens d'une famille un peu bizarre où l'absence de parole avait valeur d'échange. Je l'ai compris plus tard même si concrètement, je me suis barré de là dès que j'en ai eu l'occasion avec sous le bras, mon instinct de survie par la maîtrise des mots. Je me retourne sur cette histoire qui est la mienne et j'y porte la lumière de mon présent, de mon âge*.

Je perçois aujourd'hui ce qui a mené certains de mes pas, emmené certains de mes choix. Je suis repassé tout seul par la case départ, je n'ai pas palpé dix mille euros et j'ai pour l'instant toujours échappé à la prison*. Je n'ai pas touché le gros lot à la naissance et comme je ne suis pas doté de patience, j'ai préféré avancer que de l'attendre.

Je ne m'en serais sans doute pas sorti sans un système social solidement bâti. Si j'ai reçu de l'aide quand j'avais touché les fonds [eh tu l'as vue la vanne ?], c'est de la part de la communauté. Je n'ai vu aucun riche me porter secours*. Je les ai côtoyés avec respect et je leur ai toujours payé mes loyers mais aucun n'a jamais pensé à fournir autre chose.

Je ne dis pas que je suis malheureux de ce que j'ai vécu, que je regrette quoi que ce soit de cette enfance particulière, bien au contraire. Sans cette période un peu étrange*, sans cet enfermement ouaté, sans cette prison de silence aux barreaux de mutisme,  je n'aurais certainement pas la chance d'être celui que je suis désormais devenu.

Je ne vous oblige pas à partager ce sentiment mais je vous assure que, tel que je me vis de l'intérieur, je suis quelqu'un de vraiment intéressant à découvrir*. Sous le vernis de l'apprentissage, sous les apparences de la norme acquise, dans l'au-delà de l'apparence identitaire, derrière le mimétisme familial, je déterre qui je suis.
Et même si on m'a inculqué que la prudence* est mère de tout, malgré les interdits qu'on m'a collés sur le paletot comme autant d'adhésifs publicitaires pour les valeurs familiales, nonobstant la peur et l'effroi installés sur le canapé comme s'ils habitaient chez moi, j'espère toujours retrouver trace du gars d'origine.


PS : donc le cadeau que je souhaite
m'offrir pour le Noël mes dix ans*,
c'est juste la capacité de comprendre
tout ça un peu plus vite. :-)


Illustration*