lundi 13 juillet 2015

François Hollande [tous ensemble, tous ensemble]



Tu sais que je ne suis pas fan de François Hollande. Disons qu'il est, dès le départ et à mes yeux, le plus mauvais choix que pouvait faire la gauche pour s'installer aux manettes du pays. Ce point de vue a été conforté après sa première rencontre avec madame Merkel. Au lieu de rester sur le mouvement de sa campagne, sur l'énergie de son élection, au lieu de retourner la table, option qui avait ma préférence, il a traité ça tout en rondeur. Comme si Angela avait une passion pour la délicatesse.

Ça m'a un petit peu énervé.

Mais là, je suis obligé de reconnaitre qu'il a bien manœuvré pour éviter  la sortie de la Grèce de la zone euro. Au milieu de tous les pays qui étaient plus ou moins d'accord pour l'envoyer se faire voir, sur la carte, il demeurait la France, ultime camp retranché des irréductibles. S'il n'a pas dû passer un week end facile, il a donné à entendre une musique différente en Europe, non pas celle des experts comptables mais celle des humanistes : la Grèce est le berceau de notre Histoire européenne, elle ne PEUT pas en sortir.

Ça m'a un petit peu fait plaisir.

Evidemment le lendemain est comme un lendemain de cuite. Quand je sors du symptôme de Stockholm, pour découvrir ce qui a vraiment été signé. Si la volonté du peuple grecque était de rester parmi nous, ils vont maintenant découvrir le prix de l'abonnement. Ce plan est une véritable saignée économique et une prise du pouvoir des instances européennes sur un pays démocratique qu'ils ont mené à l'abattoir. L'animal a lutté toute une nuit avant d'en accepter l'augure.

Ça m'a un petit peu dégouté.

Quel est ce président de gauche qui livre ainsi un pays ami dont il a lui-même lié les mains, à son ennemi la finance ? Que se passe-t-il dans la tête d'un homme du Parti Socialiste — coucou Jaurès, coucou Mitterrand, coucou Jospin — au moment où il obtient la reddition d'une démocratie contre les banquiers rapaces ? Qu'est ce qu'on ressent à donner raison à l'orthodoxie comptable de la droite conservatrice européenne contre la volonté d'un peuple portée par Alexis Tsipras ?

Ça m'a un petit peu révolté.

Mais quand tu suis l'actualité, il est bon de ne pas rester les yeux collés sur l'écran. C'est aussi mauvais pour la vue que pour la compréhension. Il faut savoir relever la tête, reprendre un peu de hauteur pour trouver des perspectives. J'essaie de faire cet exercice afin de comprendre la stratégie de François Hollande et j'arrive à cette hypothèse :

Maintenant qu'il a réussi à conserver la Grèce dans la zone euro [du moins si l'accord passe le vote des parlements nationaux] et que celle-ci va récupérer des moyens financiers, il va pouvoir pousser l'Europe à desserrer le verrou de l'austérité. Ces cinq dernières années, la Grèce a été le laboratoire d'une politique économique qui a mené le pays à sa ruine. Si les créanciers veulent récupérer leurs billes et s'ils ne sont pas idiots, ils ne vont tout de même pas recommencer les mêmes erreurs. Ils doivent changer de méthode.

Il faut, dans le sud de l'Europe comme ailleurs, retrouver de la croissance et François Hollande peut à présent défendre l'idée de relâcher la pression des traités. Si l'Europe est sauvée par ce compromis, après ces négociations au bord de l'abîme, elle est à l'état de ruines. Reprendre le chemin de la croissance, tous ensemble serait le meilleur moyen de faire renaître le projet européen. Le locataire de l'Elysée a de nouveau une chance d'être un grand président de la République en portant cet étendard. Il a maintenant l'occasion d'utiliser la Grèce comme le cheval de Troie d'un changement de la stratégie européenne.




Nota benêt : en même temps, un pays qui aime autant
les ruines, il y avait de quoi se méfier.