« Depuis les années 80, on a du chômage de masse et du sous-emploi. Ceux qui voudraient travailler à plein temps ne travaillent qu'à mi-temps. Le système politique est à l'origine de cette pénurie d'emploi. Non seulement ça ne se résout pas mais ça ne cesse d'augmenter.
Ceux qui sont au sommet de la hiérarchie, ceux qui monopolisent le marché, les multinationales, l'État et les politiciens qui défendent leurs intérêts ne veulent pas mettre ce système en cause, malgré les fortes inégalités.
Si tu es au chômage, on va te convaincre que c'est de ta faute. Parce que si ça ne vient pas de toi, c'est tout le système qui est remis en cause. Et aucun groupe politique n'admettra ça. (…) Tu dois être persuadé que c'est de ta faute. Si tu n'as pas de travail, c'est parce que ton CV est mal rédigé ou parce que tu n'as pas assez cherché. Du coup, tu seras puni.
Ils vont interrompre les indemnités que tu touches. Pour un mois, ou bien pour 3 mois. Dans le pire des cas, ça peut aller jusqu'à trois ans ! Trois ans, sans aucun revenu. En Grande-Bretagne, c'est le pire châtiment pour n'avoir pas trouvé l'emploi qui n'existe pas. Du moment où tu crois que c'est de ta faute, l'État dispose d'une classe pauvre qui reste en bas du système et qui ne se révolte pas.
C'est une question d'idéologie et de conscience. Le rôle de la gauche est de dire : “on ne peut pas tolérer ça parce que c'est le système en soi qui exige et produit le chômage, le sous-emploi, la pauvreté, etc.” ».
Ken Loach, interview pour la sortie de «Moi, Daniel Blake*», septembre 2016