vendredi 29 juin 2012

La marelle [Jouer à sauter !]




Durant toute ton enfance, tu apprends comment fonctionne le monde. Tu découvres avec des yeux neufs ce que tout le monde semble connaitre déjà ; l'aventure est au coin de la rue. Et à l'adolescence, c'est comme si quelqu'un re-mélangeait le paquet de cartes.

Les filles avec qui tu jouais la veille à la marelle, il faut maintenant les inviter au resto avant d'espérer les envoyer sauter jusqu'au ciel.  Dès qu'elles attrapent de la poitrine, les femmes deviennent des personnes bizarres. Dès qu'elles ont des nibards, ce n'est plus du tout le même jeu.

Comme si la vie était devenue plus sérieuse… 


source image*

 

dimanche 24 juin 2012

À table ! [Vaste programme…]




Comme on traverse la solitude à grandes enjambées. Les yeux dans les poches, le mouchoir par dessus. Il ne faut pas rêver car ça laisse croire à du meilleur qui n'arrive jamais. C'est plutôt qu'à vouloir toujours autre chose que ce qu'on nous sert, on se dégoute nous-mêmes de la cantine. Elle est très bien cette purée, de toute façon, il n'y en a pas d'autres. Pas d'autres lieux où la salade est plus verte. Il n'y a pas l'option «Choix du menu» dans cette application.

Pour avoir la vie qu'on veut, il faut aimer la vie qu'on a. Avec les chaos et les difficultés. Personne n'a écrit nulle part : ce sera facile et drôle et la joie régnera sur un monde merveilleux. On peut alléger le repas si on décide que tout cela n'est pas bien grave, puisqu'on meurt à la fin. Rois et reines, manants et manantes, intello sans drapeau, négro sans papiers, mariés, divorcés, dernier des cons, on finit tous dans un estomac d'asticots ou parmi la cendre d'un mégot froid.

N'aie pas l'audace de prétendre à laisser une trace à cause de ton passage par la case départ. De quelle mégalomanie faut-il souffrir pour penser ainsi ? Sur quelque six milliards d'humains, tu penses raisonnablement que tu as une quelconque importance ? Que tu es doté d'une telle personnalité qu'il faut en graver l'histoire ? Ne te laisse pas aller à te croire important. Reste toi-même, ne te mets jamais la barre plus haut que cela. C'est à peine suffisant de toute une vie, pour atteindre qui l'on est.

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vendredi 22 juin 2012

Les limites [la normalité !]




Il y a des gens qui trouvent que les enfants font d'excellents souffre-douleurs*. D'un poids convenable, faciles à manipuler, pratiques. Pour d'autres gens, ce sont de parfaits partenaires particuliers. Comme dans l'ensemble, ce n'est pas notre comportement, nous convenons qu'il s'agit d'une maladie mentale. Ça mérite dans certain cas, une attention très attentionnée.

Nous fixons continuellement les règles de notre normalité. Le racisme était admis comme une opinion, c'est devenu un délit. Je ne discute pas ici du bienfait ou non de cette interdiction. Je souligne qu'à ce moment-là, un nombre suffisant de personnes a décidé que ce n'était plus normal. Le «Au-delà de cette limite, votre ticket n'est plus valable» a changé de géolocalisation.

Notre société évolue perpétuellement, les valeurs sont des variables qui changent selon la saison et fluctuent à la tête du client. Tu peux parfaitement parler tout seul dans la rue, aussi longtemps que tu n'agresses personne. Si tu ne heurtes pas la sensibilité d'une portion importante de la population, il n'y a personne pour t'inclure dans une Loi.

Se pose ici la question de pour ou contre la burqa. D'abord comme disait Desproges, tant que vous ne touchez pas à mes affaires, je m'en fous. Mais je sens bien que selon le principe ci-dessus énoncé, il devient naturel qu'une population décide que tel type de vêtement est inconvenant.

Et s'il arrivait que des naturistes viennent copuler en public et en tout lieu, ce ne serait pas plus acceptable. C'est l'endroit exact où se touchent les rives de la liberté individuelle et de la volonté collective. Une communauté de citoyens considère que c'est la goutte d'eau qui fait déborder la vase. Une communauté de citoyens considère que chacun se vêt comme il lui plait. Pour ma part, je trouve épatant qu'on puisse s'occuper de ce genre de questions quand il suffit de laisser au temps d'en faire son affaire.

Mais dans cette même idée, si nous décidions, collectivement que le nationalisme est une maladie mentale ? Un comportement qui dépasse les bornes de notre acceptable collectif, qui excède notre capacité d’acquiescement. Puisque l'extrêmement de droite Anders Breivik* peut être déclaré psychiatriquement fou, comment devrons-nous considérer les moins gravement atteints par cette maladie ?

Nous sommes déjà en train de refaire les barrières, de retoucher les limites de l'acceptable d'avant.


Source de l'image*

lundi 11 juin 2012

Toute sa vie [des petits riens].




Toute sa vie sans rien, les mains dans les poches, le nez en l'air à regarder passer le vent, les nuages. Apercevoir le ciel sans y chercher rien.

Ou bien ramasser des cailloux sur la plage. Dans un sachet plastique, des coquillages qui s'en iront dormir au fond d'une armoire. Des babioles, des bibelots, de tous petits objets qui contiennent notre magie personnelle. Le nounours que t'a offert grand-mère, cette tasse hideuse emplie d'un pot-pourri de souvenirs, une vieille pièce que t'avait donnée ton papa, une montre arrêtée, une fleur séchée, nos gris-gris sont des breloques.

De la thaumaturgie de pacotille qui nous permet de ranger nos pensées, de tenir en ordre nos émotions. Cette boîte sur ma bibliothèque a toute une histoire. Il me suffit de la regarder pour en retrouver la trace. Les sentes herbeuses où tu courais, ta jupe claire et légère dans le soleil de plein midi. La mèche de tes cheveux entre mes phalanges. La perle de sueur au-dessus de ta lèvre.


Nous érigeons peu à peu nos musées, nos mausolées. Hors de l'église Catholique et des préceptes en cours, nous gardons dans nos cerveaux païens, cet attachement aux choses. Objets inanimés que nous chargeons de l'âme des moments disparus. Des amulettes et des objets comme des passages magiques entre nous et nos douleurs antérieures. Du matériel chargé de l'énergie des absents. Un simple caillou, une clef hors d'usage, une boucle d'oreille sans sa jumelle, des petits riens insignifiants à qui l'on trouve un sens.

Source photo : c'est moi qui l'ai faite*

dimanche 3 juin 2012

L'éternité [pourvu que ça dure !]

 


630ème article sur ce blog


Les Hommes ont quatre ou cinq ans d'éternité insouciante. Après quoi, ils découvrent un jour, un oisillon crashé du nid, un chat écrabouillé sur la route ou une mamie grise et froide dans un lit. Ils prennent connaissance de la mort indépassable et passent le reste de leur vie à courir à la recherche de cette innocence désormais en fuite.

Qu'ils allongent ensuite le pas du père ou qu'ils s'épuisent à en briser une par une les statues, ça les occupent toujours assez. Des étendues de jours et d'heures à ne pas dialoguer avec soi-même. La colère intime, ça fait un de ces boucans, on ne s'entend plus penser. Des tempêtes à couvrir sa voix intérieur.

Vieillir c'est la croiser de plus en plus souvent, pouvoir compter ses victimes au delà d'un nombre exprimé en doigts. Une liste de prénoms dont certains n'ont même plus de visage. La mémoire est un labyrinthe où règnent en nombre les ombres. Tu deviens trop vieux le jour où tu n'arrives plus à remettre de l'ordre.

Je sais pourtant que je l'ai conservé quelque part, ce moment, sur la grand route, où elle a pris ma main. Où l'ai-je rangé ? Dans quelle pile et au fond de quelle boîte ? Je pensais qu'il était là.

C'est comme décider de mettre le nez dans une armoire où les strates se sont trop longtemps empilées les unes par dessus les autres. On finit par y retrouver ce qu'on ne cherchait pas, voire surtout pas. Et l'après-midi s'écoule du spleen au regret, des sourires aux larmes. Les Hommes ont quatre ou cinq ans d'éternité insouciante. Ensuite ils découvrent la nostalgie tombée du nid…

Image : miror of memories*
 

vendredi 1 juin 2012

Les générations [No futur !]

 
 
 
C'est parce que leurs parents avaient connu la guerre que la génération de 1968 avait besoin d'un truc puissant pour se fabriquer ses propres rêves. Ils ont pensé basculer le vieux monde cul par dessus tête. Ils ont commencé en retirant les pavés des rues et en dévergondant les filles. Voyant la menace, on leur a fait un peu de place. Et on leur a donné un peu plus la parole. En échange de quelques trucs financiers pour se faire un max de blé, ils ont laissé troqué l'herbe et le patchouli. Ils ont reconverti leur goût du voyage initiatique en concept d'agences de voyage et en ouverture à la mondialisation.
 
C'est parce que leurs parents avaient inventé les Rolling Stones et les Pink Floyd que la génération 78 avait besoin d'un truc sévèrement burné pour électrifier ses propres rêves. Ils ont pensé pisser à la face du vieux monde. Ils ont lancé le riff de guitare sans riff, le morceau sans mélodie et les lendemains sans futur. Voyant leurs crêtes et leurs gesticulations, on leur a fait un peu de place. A condition qu'ils se recoiffent. The punk is not dead, je veux bien mais c'est quand même Jean-Louis David qui fait fortune.
 
Chaque génération semble se nourrir de la nostalgie de la précédente. Nous, on n'a pas connu la guerre. Nous, on n'a pas la chance d'avoir connu Coluche de son vivant. Le «nous on n'a pas» est le terreau sur lequel s'enracine l'avenir du monde.
 
La blague à laquelle vous avez échappé : le no-futur, c'est maintenant !

Image* : le film «Le grand soir» n'a rien à voir avec l'article mais caser Poelevoorde en punk, c'était tentant. A ses côté, Didier Wampas et Albert Dupontel.